Avenir de Casino: recours judiciaire des représentants des salariés

Un supermarché Casino à Ploubalay (Côtes-d'Armor), le 5 juillet 2023

By Corentin DAUTREPPE

Paris (AFP) - "Seuls d'autres juges pourront rétablir la légalité de la situation": le comité social et économique central (CSEC) de Distribution Casino France a annoncé lundi faire appel du jugement du tribunal de commerce de Paris avalisant le plan de sauvetage du distributeur en difficulté.

"Le CSEC de DCF, en plein accord avec l'unanimité des organisations syndicales, a pris la décision d'interjeter appel du jugement", ont annoncé le CSEC et l'intersyndicale du groupe dans un communiqué commun lundi.

"Pour l'heure, cet appel n'est pas suspensif et est donc sans effet sur la mise en oeuvre du plan de restructuration financière de DCF et du Groupe et sur le changement de contrôle et de gouvernance en résultant", a réagi le groupe Casino auprès de l'AFP.

Le tribunal de commerce de Paris a validé le 26 février le plan de sauvetage du distributeur d'origine stéphanoise, dernière grande étape avant la restructuration de sa dette et sa prise de contrôle par des repreneurs, les milliardaires Daniel Kretinsky et Marc Ladreit de Lacharrière adossés au fonds d'investissement Attestor.

Un porte-parole des repreneurs a indiqué lundi prendre "acte de cet appel qui ne remet pas en cause nos engagements" en matière d'accompagnement social, "à savoir négocier un plan de départ volontaire, être mieux disant que les accords d'entreprise et porter une attention particulière au site de Saint-Etienne."

Le groupe, qui employait fin 2022 50.000 personnes en France sous des enseignes bien connues comme Casino, Franprix ou Monoprix, ne pouvait plus faire face à ses échéances de dette. Il a en outre annoncé avoir réalisé une année 2023 catastrophique avec notamment une perte nette de 5,7 milliards d'euros pour moins de 9 milliards d'euros de chiffre d'affaires.

La restructuration de la dette de Casino prévoit d'écraser environ 5 milliards d'euros de créances, et est permise par l'apport d'argent frais à hauteur de 1,2 milliard d'euros, dont plus de 900 millions par le consortium de repreneurs.

C'est ce que prévoit le plan de sauvegarde validé par le tribunal de commerce, bien que le CSEC de DCF comme le ministère public eussent émis un avis défavorable.

Les administrateurs et mandataires judiciaires ainsi que le CSE de Distribution Casino France, le représentant du personnel et le ministère public avaient possibilité de faire appel. "En l'absence de recours suspensif, il est envisagé que l'ensemble des opérations prévues par la restructuration financière soit réalisé le 27 mars 2024", avait indiqué Casino fin février.

\- Cour d'appel -

Or, le CSEC a donc fait appel, qui n'est toutefois "pas suspensif", a bien précisé l'une de ses avocates, Françoise Maréchal Thieullent. "Seul celui du ministère public le serait".

"Nous espérons que le parquet fera aussi appel, afin que justice soit rendue", a indiqué le CSEC lors d'une conférence de presse à Paris. A ses yeux, "contrairement à ce que dit la direction, cet appel et le rejet du plan n'impliqueront pas nécessairement une liquidation".

"Plus de 6.000 emplois au minimum sont menacés dans le groupe sans parler des 16.000 salariés transférés avec les magasins qui n'ont à ce stade aucune garantie de ne pas être licenciés au lendemain des cessions" de magasins à Auchan, Intermarché et Carrefour, ont déploré le CSEC et l'intersyndicale du groupe dans leur communiqué commun.

Le parquet a dix jours pour faire appel du jugement du tribunal de commerce à compter de la date de ce jugement.

Concernant l'appel du CSEC, la cour d'appel pourrait au vu de l'urgence de la situation et selon les autres avocats de l'instance représentative des salariés, Olivier Debeine et Matthieu Boissavy, statuer dans un calendrier resserré, sans doute d'ici l'été.

Si la cour d'appel venait à infirmer la décision du tribunal de commerce, la société Distribution Casino France, qui emploie aujourd'hui 18.000 des 50.000 salariés de Casino, reviendrait à sa situation économique antérieure au plan de sauvegarde accélérée, selon ces avocats.

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