"Mentalité de colonisateur": Pékin dénonce les critiques sur la loi de sécurité hongkongaise

Le Conseil législatif lors de l'examen de l'article 23 de la loi sur la sécurité nationale, le 19 mars 2024 à Hong Kong

Hong Kong (AFP) - Pékin a dénoncé mercredi les critiques occidentales concernant la nouvelle loi sur la sécurité à Hong Kong, accusant le gouvernement britannique de faire preuve d'une "mentalité profondément ancrée de colonisateur" et l'Union européenne d'hypocrisie.

Le Conseil législatif de Hong Kong, ancienne colonie britannique avant sa rétrocession à la Chine en 1997, a voté unanimement mardi une nouvelle loi sur la sécurité nationale, qui prévoit l'emprisonnement à perpétuité pour des infractions telles que la trahison et l'insurrection.

Le texte, qui entrera en vigueur le 23 mars, vient compléter la loi sur la sécurité nationale imposée par Pékin dans le territoire en 2020 après les grandes manifestations de l'année précédente en faveur de la démocratie à Hong Kong.

Le chef de la diplomatie britannique David Cameron a déclaré que le texte "portera encore davantage atteinte aux droits et libertés dans la ville" et "sape la mise en œuvre par Hong Kong de ses obligations internationales contraignantes" prévues lors de la rétrocession.

En réponse, le commissariat chinois aux Affaires étrangères a reproché au Royaume-Uni d'être "hypocrite et de faire deux poids deux mesures", en référence aux propres lois britanniques sur la sécurité nationale, dont une a été adoptée l'année dernière.

"Le Royaume-Uni a fait des commentaires incendiaires et irresponsables sur la situation à Hong Kong (...) cela est dû à une mentalité profondément ancrée de colonisateur et de prédicateur", a souligné le commissariat, qui fait office de ministère des Affaires étrangères chinois à Hong Kong.

"Nous demandons instamment au Royaume-Uni de rectifier sa position, de faire face à la réalité et d'abandonner le fantasme de poursuivre son influence coloniale à Hong Kong", a-t-il poursuivi dans un communiqué publié mercredi.

Le commissariat a publié une réponse distincte aux critiques de l'UE, qui avait déclaré que la nouvelle loi affecterait "l'attractivité à long terme" du territoire en tant que centre d'affaires international.

"Nous demandons instamment à l'UE de prendre en compte le vif intérêt que suscite la loi à Hong Kong et d'abandonner sa politique hypocrite" et ses "préjugés", indique la déclaration.

\- "Grande préoccupation" -

La nouvelle loi votée par le Parlement local énumère cinq catégories d'infractions en plus de celles déjà punies par le texte de 2020: la trahison, l'insurrection, l'espionnage et le vol de secrets d'Etat, le sabotage mettant en péril la sécurité nationale, la sédition et l'"interférence extérieure".

Baptisée "Article 23", la nouvelle loi aura pour but de combler les "vides" laissés par la législation précédente, a estimé le dirigeant de Hong Kong, John Lee.

Le gouvernement du territoire a également affirmé que la création de cette nouvelle loi était nécessaire en vertu de la Loi fondamentale, la mini-Constitution qui régit l'île depuis sa rétrocession en 1997.

L'ambassade chinoise au Royaume-Uni a assuré que le texte "protège totalement les droits et libertés dont jouissent les résidents de Hong Kong" et accusé M. Cameron de "distordre la réalité".

Les Etats-Unis, les Nations unies et le Japon ont eux aussi critiqué l'article 23.

Le porte-parole du Département d'Etat américain Vedant Patel a déclaré mardi que Washington était "alarmé" par le contenu de la loi.

Le Haut-commissaire aux droits de l'ONU, Volker Türk, a lui qualifié le texte et son adoption "précipitée" de "pas en arrière pour la protection des droits humains".

Quant au Japon, il a exprimé sa "grande préoccupation concernant le passage (de la loi), qui va encore plus saper la confiance dans le principe du +Un pays, deux systèmes+", censé garantir les libertés particulières de Hong Kong, dont l'autonomie judiciaire et législative par rapport à la Chine continentale qui lui a valu son statut de centre financier mondial.

Ce principe hérité de l'accord de rétrocession doit courir jusqu'en 2047.

© Agence France-Presse