Char du futur: Paris et Berlin distribuent les rôles aux industriels

Le ministre français des Armées Sébastien Lecornu (d) et son homologue allemand Boris Pistoirus lors de la signature de l'accord MGCS, le 26 avril 2024 à Paris

By Mathieu RABECHAULT

Paris (AFP) - Sept ans pour décider qui va faire quoi: les ministres allemand et français de la Défense, qui ont repris en main le projet enlisé de char commun du futur, ont entériné vendredi la répartition des tâches entre industriels français et allemand pour le développer.

Boris Pistorius et Sébastien Lecornu ont mis en scène à Paris le redémarrage de ce programme emblématique de la coopération de défense entre les deux pays, encalminé depuis son lancement en 2017 par les rivalités industrielles et les difficultés des deux pays à s'accorder sur leurs besoins militaires.

Ils ont ainsi paraphé devant les caméras un protocole d'accord gravant dans le marbre la répartition de la charge de travail à 50-50 entre industriels des deux pays.

Il a fallu "beaucoup de temps et d'effort mais la signature aujourd'hui est vraiment un jalon", s'est félicité Boris Pistorius lors d'une conférence de presse conjointe

Le MGCS (acronyme anglais de Système de combat terrestre principal) est un "système de systèmes": un char proprement dit accompagné d'autres véhicules, habités ou non.

Il comportera d'importantes ruptures technologiques (recorus à l'IA, drones pour protéger le char, lasers...). Il doit remplacer à l'horizon 2040 les Leclerc français et Leopard allemand.

Pour Sébastien Lecornu, "ce n'est pas le char du futur mais le futur du char (...), on est les premières nations à s'occuper de cette ère 2040 en matière de cavalerie et de blindés".

\- "Contrats à la fin de l'année" -

Financé à parts égales par Paris et Berlin et mené sous direction allemande, ce programme était à l'origine conduit par KNDS, une entité créée pour l'occasion entre le français Nexter et l'allemand KMW. L'irruption en 2019 de l'allemand Rheinmetall a déstabilisé l'édifice.

Pour dépasser le blocage, "il a fallu repartir des besoins opérationnels des deux armées de Terre" et non des capacités industrielles de chacun, a expliqué Sébastien Lecornu.

L'accord signé vendredi désigne un industriel responsable pour chacun des huit piliers à développer: plateformes, tourelle et "feux classiques", feux innovants (missiles, armes à effet dirigé), communications et "cloud" de combat, simulation, protection, infrastructures.

La responsabilité de certains piliers sera partagée entre industriels, notamment pour la tourelle et le canon, domaine où KNDS-France (ex-Nexter) promeut son canon de 140 mm quand Rheinmetall pousse le sien de 130 mm.

Les deux ministres n'ont pas détaillé la répartition.

Commence maintenant une phase de négociations avec les industriels pour développer le démonstrateur du MGC (phase 1A), une sorte de pré-prototype afin de tester les briques technologiques. Celui-ci sera fabriqué au tournant de la décennie.

"L'objectif est d'avoir les contrats à la fin de l'année, c'est très ambitieux," selon Boris Pistorius. D'ici là, il va falloir que les industriels, KNDS et Rheinmetall, mais aussi une nuée d'autres entreprises des deux pays, actent la répartition exacte des responsabilités et la façon de s'échanger les informations, et mettent en place une organisation industrielle spécifique.

D'ici là, il va falloir que les industriels, KNDS et Rheinmetall, mais aussi une nuée d'autres entreprises des deux pays, actent la répartition exacte des responsabilités et la façon de s'échanger les informations, et mettent en place une organisation industrielle spécifique.

Alors que l'Italie et d'autres pays européens cherchent à rejoindre le projet franco-allemand, Boris Pistorius a confirmé que le programme serait "ouvert à des partenaires plus tôt qu'on ne le croit mais il faut déjà arriver aux contrats" entre industriels français et allemands.

© Agence France-Presse